Une fois Fomblard est triste comme des cigarettes qui tombent du paquet du ciel. Il regarde le ciel. Souvent le ciel a un peu mal aux genoux quand il pleut, le ciel souvent fait des promesses, mais ce matin pas de nuage. Ses pensées semblent l’éviter exprès quand il les rencontre. Il n y a que les reflets sur l’eau qui sont là avec lui. Il a le souvenir d’avoir perdu une chose sans souvenir de ce que c’est. Et quand il y pense il a l’impression d’avoir perdu deux choses, sans souvenir de ce que c’est, et il en est ainsi jusqu’à trente, et quand il pense à la trente et unième année de sa vie, il a compris qu’il a perdu la jeunesse. Jusqu’ici il perdait tout en ligne droite, ce qu’il perdait le pas d’après l’oubliait, mais à présent, d’un virage après l’autre qui monte il peut se retourner et voir ce qui est arrivé qui n’y arrive plus.
Il sent son coeur arroser un jardin, et quand il veut cueillir quelque chose, il touche seulement ses pieds que son coeur perdu arrosait, avec les pleurs qui imbibent les pétales de fleurs de ses chaussettes.
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La mer fait du bien à Fomblard à cause de la lumière qui y bat des ailes et va loin chercher les yeux d’une autre civilisation. On se sent petit ainsi, et il a besoin de se sentir petit, comme les oiseaux dans la neige pour ne pas fondre en vol. Aussi il fait attention à ne pas trop regarder longtemps les choses. Il faut jeter son regard comme pierre dans l’eau, mais ne pas attendre qu’il plonge, vite le relancer, chercher les ricochets. Il ne regarde que ce qu’il y a de plus fin, en général un chat qui ferme les yeux quand on le regarde. Il laisse traîner ses jambes, la balance de ses pensées, essaie de se détacher, d’être ami-copain avec la plus petite quantité de matière possible comme une pierre au fond de l’eau est copine-amie de l’océan.
A la fin de chaque jour, Fomblard écrit une lettre de rupture à quelqu’unquelque part qui existe peut-être, porte peut-être ce nom. Cela commence par «c’est trop tard pour se connaître, mais on n’y arrivera peut être pas un jour», et cela se termine par « Votre Fomblard occupé à donner à boire à la rivière qui a mangé ses poissons dans l’estomac», ou choses diverses qui se disperseront le plus légèrement possible dans l’esprit des voyageurs.